Créé en 2015, le Droit individuel à la formation des élu-e-s (DIFE) était alors considéré comme une véritable avancée pour favoriser la montée en compétence des élu-e-s locaux-ales, confronté-e-s à une forte spécialisation des politiques publiques locales et à de nombreux enjeux transversaux. Quelques années plus tard : où en est-on ?
Un dispositif encore trop méconnu
Avec un potentiel de plus de 500 000 élu-e-s locaux-ales, dont 99 % d’élu-e-s municipaux-ales et intercommunaux-ales, a-t-on assisté à une utilisation massive du DIFE depuis sa création ? Hélas, non. C’est ce que révèle le rapport « La formation des élus locaux », publié en janvier 2020 par l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS).
Entre janvier et octobre 2019, seulement 6 500 élu-e-s ont obtenu la validation d’une demande de formation dans le cadre du DIFE, via la plateforme en ligne dédiée, gérée par la Caisse des dépôts et de consignations.
Si le DIFE était une bonne intuition pour répondre aux attentes des élu-e-s, tant en termes de formation générale, que technique ou de savoir-être, il est insuffisamment connu et souvent confondu avec les autres dispositifs relatifs à la formation des élu-e-s.
La formation des élu-e-s : état des lieux
En effet, aujourd’hui les élu-e-s peuvent solliciter des formations grâce à deux leviers :
- Le DIFE : via la plateforme nationale « Mon compte élu», abondé de 400 euros par an mais plafonné à 700 euros en cas de non-utilisation.
- Le crédit formation obligatoire de leur collectivité dont le montant et les modalités d’utilisation sont définis en début de mandat.
Or, le rapport de l’IGAS rappelle que, tous leviers confondus, et pour l’année 2019, seulement 3 % des élu-e-s locaux-ales auraient suivi une formation dans l’année.
Pourquoi un tel échec pour la formation des élu-e-s ?
Au-delà de la méconnaissance du DIFE par les élu-e-s, la plupart des collectivités ne respectent pas l’obligation légale de dédier un minimum de 2 % des indemnités dues aux élu-e-s pour financer des formations. Ainsi, en 2018, les collectivités consacraient seulement 15 millions d’euros de leur crédit, là où la loi prévoit plus de deux fois plus (34 millions d’euros).
Ce constat est d’autant plus insatisfaisant que le rapport de l’IGAS démontre que les collectivités les plus grandes et les mieux dotées en ressources humaines concentrent l’utilisation du droit à la formation des élu-e-s, illustrant ainsi le manque d’accompagnement des petites collectivités, où l’on constate pourtant un phénomène inquiétant de perte de vocation, élections après élections.
Et le DIFE : quels sont les freins ?
Si les dispositions législatives ne manquent pas, et au-delà de la méconnaissance de ce droit, les dernières réformes du Gouvernement liées à l’utilisation du DIFE n’encouragent pas son utilisation.En effet, si l’ordonnance de juin 2021 a permis un contrôle renforcé des organismes de formation et la création d’un espace dédié libellant les droits en euros plutôt qu’en heures, elle en a plafonné le montant à 700 euros par élu-e ce qui a eu pour effet d’encourager les formations « low cost » au mépris de formations de qualité.
Par ailleurs, et si les arnaques au Compte formation sont nombreuses et nécessitaient une réaction, l’introduction d’une étape supplémentaire via l’obligation de connexion depuis France Connect + est venue complexifier un peu plus l’usage de ce droit pour les élu-e-s.
Mais alors, comment se former ?
D’abord, il est essentiel que les élu-e-s prennent connaissance de leurs droits et soient incité-e-s à ouvrir leur espace personnel sur la plateforme de la Caisse des dépôts et de consignation. Car malgré les faibles montant alloués par le Gouvernement et la complexité technique d’accès, ces crédits restent essentiels pour s’offrir une formation et surtout seront mobilisables, en fin de mandat, si les élu-e-s locaux-ales souhaitent se lancer dans un processus de réinsertion ou d’évolution professionnelle. En effet, le DIFE pourra alors compléter les crédits formations que chaque actif-ve accumule par ailleurs pour compléter ses crédits obtenus.
De plus, il est toujours possible de demander à sa collectivité de compléter le financement d’une formation souhaitée mais dont le montant dépasse les droits individuels ouverts : la seule règle en la matière est que le DIFE de l’élu-e concerné-e participe au minimum à 25 % du coût de la formation. Les frais annexes liés à la formation (transports, hébergements) peuvent être pris en charge dans les conditions prévues pour la formation des fonctionnaires.
Quel rôle pour les organismes de formation ?
Les organismes de formation agréés par l’État pour la formation des élu-e-s ont un rôle essentiel pour faire connaître l’écosystème du droit à la formation à la fois en termes de communication que d’innovation.
Drapeau Blanc accompagne les élu-e-s dans l’ouverture de leurs droits via un tutoriel – DIFE. Retrouvez-le en cliquant ici
Antoine Alibert, responsable du pôle « Partager » de Drapeau Blanc